Alpha Blondy : « Les dirigeants africains sont victimes de l’épistémicide »

Le « rastafoulosophe » Alpha Blondy vient de mettre sur le marché du disc, son nouvel album intitulé Eternity. Dans une interview avec nos confrères de Pan African Music, l’artiste ivoirien a saisi l’occasion se prononcer un certain nombre de questions, dont la gouvernance en Afrique.  

Alpha Blondy ne change pas, les années glissent sur lui et ne laissent comme témoin de leur passage que la blancheur de ses cheveux. Les lunettes noires et les « tu-comprends – you-know » qui rythment ses prises de parole eux aussi sont toujours là, ses coups de gueule et ses jeux de mots, ses colères et ses éblouissements.

Quarante ans et plus de 20 albums après l’inaugural Jah Glory où figurait « Brigadier Sabary », le rasta fou, ou le rastaphoulosophe en a toujours gros sur la patate, et ne se prive pas de donner son avis sur les questions qui agitent notre monde. Une bonne partie des 18 chansons de son nouveau projet Eternity y est consacrée, et revient sur des thèmes qui lui sont chers : l’amour et la guerre, le pouvoir et l’argent, la souveraineté et l’indépendance…

Parlant des rapports entre les dirigeants africains qu’on taxe de marionnettes face à leurs homologues occidentaux, le  reggae man estiment qu’ils sont victime de « l’épistémicide »   

« Je ne dirais plus marionnettes, ils sont victimes de ce qu’on appelle l’« épistémicide ». L’Africain n’a pas confiance en l’Africain, il croit en tout ce que les Européens lui diront. Les Africains n’ont plus confiance en leurs propres sciences, ils n’ont plus confiance en leur personne parce qu’ils ont été déconstruits pendant 400 ans avec l’esclavage occidental et avec l’esclavage arabo-musulman, donc c’est des gens déconstruits qu’on doit reconstruire, et nos dirigeants ne sont pas des marionnettes mais des malades, des malades d’épistémicide », fait savoir Alpha Blondy.

Pour donner du contenu à cet terme, Alpha Blondy renseigne qu’il s’agitde « la mort de la science de l’autre, c’est dire : que ce que toi tu penses n’est rien, ta religion c’est du fétichisme, c’est nul, ta médecine c’est zéro, tout ce qui est valable c’est la médecine occidentale, européenne et même toi, en tant qu’entité, tu es un sous-homme. Donc tout le monde peut se permettre de faire faire de toi ce qu’il veut, on peut t’enchaîner comme quand on a pensé que le noir n’avait pas d’âme… on peut tout se permettre. On t’a appris à te haïr, à ne pas t’aimer, tes populations se dépigmentent, tes jeunes viennent se noyer par milliers dans la Méditerranée et toi aussi, en tant que président Africain tu es victime de cette maladie, de cet épistémicide, parce que pour faire quelque chose, tu attends que la France vienne défendre ta souveraineté. C’est comme l’esclave libéré qui ne sait pas où aller : il retourne dans la maison du maître… », a-t-il déclaré.

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